Bonjour guillaumek,
Si vous êtes surpris de nos exclusions de certains pays de notre univers d'investissement, c'est que vous êtes un nouvel abonné et probablement un investisseur néophyte en entreprises chinoises.
Comme nous le soulignions dans
cet article daté de 2012, nous avons connu dans le portefeuille daubasses 1er du nom ainsi que dans nos portefeuilles personnels un nombre disproportionné de fraudes comptables avec des faillites totales à la clef. Et nous avions alors décidé de ne plus investir en Chine continentale communiste. Tout en précisant que nous nous laissions une ouverture pour les zones chinoises à statut particulier et capitalistes : Hong Kong, Macao et Taïwan.
Extrait de l'article qui est une réponse à un abonné qui nous posait des questions sur les chinoiseries :
Question de Nicolas :
-En quoi la Chine serait un pays qui « trafiquerait » plus ? La SEC ne les sanctionne pas ? Ils n’ont pas les mêmes règles comptables que nous ?
-N’est-il pas possible de savoir qui triche au cas par cas au lieu de supprimer de ses recherche une région aussi importante ?
-Et respecter l’actionnaire minoritaire ça veut dire quoi ? Verser des dividendes ? On s’en fout ce n’est pas le but de l’approche daubasses non ?
Les « Daubasses » :
Ce serait un peu long à expliquer dans un simple mail, nos abonnés ont pu suivre nos pérégrinations en Chine au travers des différentes lettres mensuelles. Pour les sociétés que nous avons en portefeuille, citons en vrac : dilution à l’excès des actionnaires, litiges non déclarés, surestimations d’actifs, …
« On s’en fout ce n’est pas le but de l’approche daubasses non ? »
==> non, l’approche « daubasses » consiste à chercher des sociétés sous évaluées par rapport à leurs actifs, pas des sociétés gérées par des directions malhonnêtes. Vous nous demandiez pourquoi votre portefeuille fictif avait fait – 40 %, c’est notre réponse à cette question.
« N’est-il pas possible de savoir qui triche au cas par cas au lieu de supprimer de ses recherche une région aussi importante ? »
==> Hélas, non
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Voilà donc pour cet échange riche en enseignements.
D’emblée, nous ne pouvons pas nous empêcher de ranger Nicolas parmi les investisseurs intelligents chers à Ben Graham. Pourquoi ?
Tout d’abord pour sa démarche. En effet, Nicolas a décidé de chercher lui-même des sociétés décotées et de retenir les sociétés correspondant aux critères « Value » bien précis expliqués par Ben Graham et appliqué par les « Daubasses » depuis plus de 3 ans dans un portefeuille réel.
En plus, en investisseur intelligent, il essaie de faire au mieux ses devoirs, c’est-à-dire en tentant d’analyser les sociétés. Que l’analyse n’ait pas été suffisante n’est pas la question … ce qui nous intéresse ici, c’est la démarche de Nicolas qui veux comprendre et fournit la somme de travail obligatoire que tout investisseur doit fournir. Nous reviendrons sur cela dans quelques lignes.
Ensuite sa lucidité d’investisseur a automatiquement généré de la prudence. La lucidité de Nicolas consiste en fait en sa capacité à douter à la fois de lui-même et de ses trouvailles. Ce qui devrait être le premier réflexe de tout investisseur mais qui est finalement peu courant. En fait, il a d’abord posé un regard objectif et sans concession sur ses propres recherches. Il a sans doute trouvé trop beau le potentiel global de sa sélection. Ensuite il a jugé ses analyses un peu trop superficielles. Et sa décision, malgré un « process » de sélection rigoureux qui lui fait pourtant dire qu’il est confiant, c’est de faire un portefeuille fictif … pour voir.
C’est, selon nous, tout ce cheminement qui a permis à notre ami d’éviter une catastrophe bien réelle.
Revenons sur la Chine et les sociétés chinoises cotées aux USA ou en UK. Nous aurions d’ailleurs pu intituler cette question des lecteurs : Pourquoi ai-je perdu 40% de mon capital en 6 mois sur des Daubasses chinoises cotées aux USA ?
Si vous faites régulièrement des chasses à la « Daubasse » comme nous le faisons depuis bientôt 4 ans, vous vous rendez compte aujourd’hui qu’il est possible de dénicher sur le champ au moins une cinquantaine de sociétés chinoises présentant des décotes sur leur valeur Net-Net d’au moins 50%. Tant le marché américain que le marché anglais regorgent de ce type d’occasions que nous n’hésitons pas à qualifier aujourd’hui de piège.
En fait si nous avons compris que les sociétés chinoise étaient des pièges, c’est pour la simple raison que nous en avons jusqu’à présent possédé 6 en portefeuilles. Une d’entre elles a été revendue à plus de 4 fois notre coût d’achat, une autre, toujours en portefeuille, présente un gain modeste et, enfin, les quatre autres ont été revendues ou sont toujours détenues avec des moins-values autour de 90 % ! Notre bilan chinois est donc très largement négatif.
C’est en suivant nos sociétés au fil des trimestres au travers des mises à jour chiffrées mais également des déclarations des directions et autres informations que sont apparues de nombreuses irrégularités.
Tout comme Nicolas, nous nous sommes dit que la SEC ou le gendarme boursier du marché anglais étaient garants d’une certaine ligne de conduite.
Et bien non ! Quand une direction a décidé d’être malhonnête, elle ne se soucie guère des « gendarmes » Et au fil de nos observations, sur ces sociétés chinoises, nous avons vu des bilans ou le compte client était immuablement figé comme si les clients avaient obtenu des délais de paiement d’une durée illimitée, des dilutions extravagantes et à répétions de 100% par émissions d’actions sans que rien ne soit proposé aux actionnaires minoritaire ou encore des commissaires aux comptes ayant pignon sur rue du style PricewaterhouseCoopers , se faire « remballer » pour évidemment avoir pointer un problème dans le bilan.
Le plus énervant, c’est que nous n’avons pas été capables de nous rendre compte de ces problèmes dès le départ mais seulement en observant les symptômes sur 2 ans et demi.
C’est donc pourquoi nous ne nous pensons pas nous tromper quand nous répondons à Nicolas qu’il n’est pas possible de trier au cas par cas. Car même avec une analyse minutieuse à un moment X, les problèmes surgissent à un moment Y ou Z quand vous êtes déjà investi et c’est trop tard.
Pourquoi cette véritable « discrimination » sur les sociétés chinoises ? Soyons sérieux : des entreprises au management malhonnête, il en existe partout dans le monde. Et nous avons bien évidemment rencontré depuis 2008 des directions américaines du même acabit ou il est impossible de détecter, même avec une analyse minutieuse, les coups fourrés futurs. La seule différence se situe sur la proportion de problèmes rencontrés. Et sur ce plan, les compagnies chinoises décrochent la médaille d’or !
A partir du moment où nous avons jugé que la probabilité est plus importante de rencontrer des problèmes futurs sur ces sociétés chinoises, nous avons jugé avec bon sens que notre taux de réussite allait forcément en diminuant. Et c’est donc pour cette raison que nous avons pris la décision, à partir de la mi-juin 2011, de ne plus renforcer sur cette zone géographique tant que la SEC et autres gendarmes boursiers ne feraient pas leur boulot pour rétablir la confiance et surtout proposer aux investisseurs des documents comptables fiables, reflétant de manière authentique la situation financière de la société.
C’est vrai que c’est toujours difficile de prendre ce type de décision et, comme l’exprime Nicolas, de faire passer à la trappe un pays aussi important que la Chine avec sans aucun doute des sociétés qui en valent la peine et qui subissent, par contagion, la réputation « chiffonnée » de managers peu scrupuleux.
Mais comme l’équipe des « Daubasse » est plutôt têtue, tout en suivant une ligne de bon sens qui consiste à penser que la première règle en investissement est d’éviter les pertes, nous avons poursuivi nos recherches en privilégiant ce que nous appelons des investissements par la « bande », indirectement, sur la Chine continentale.
Il s’agit surtout de trouver des sociétés installées dans des pays développés qui exercent des activités en Chine. Bien évidemment, il y a plein de sociétés américaines, anglaises ou encore européennes qui répondent à ce critère … mais nous croyons avoir trouvé mieux avec des sociétés chinoises, actives dans des territoires chinois capitalistes depuis des dizaines d’années, avec des règles de contrôles aussi strictes que chez nous et surtout une tradition capitaliste bien ancrée. Ces sociétés se trouvent dans les paradis du libéralisme que sont Hong Kong, Taiwan ou Macao.
Bien entendu, nous sommes entrés d’abord avec le petit « orteil » subissant collectivement un biais négatif mais, à ce jour, nous n’avons rien relevé de particulier, sur ces « nouvelles chinoises » dont le chiffre d’affaires en Chine continentale est souvent bien plus important que celui de beaucoup d’entreprises européennes ou américaines.
L’équipe des Daubasses est donc toujours positionnée sur la Chine mais pas tout-à-fait de la même manière et plus vigilante que jamais.
Pour terminer, nous voudrions vous rappeler ce que signifie pour nous cette aventure « Daubasses » et surtout le rapport que nous avons voulu instaurer avec vous, ami(e) lecteur(trice) ou abonné(e) en partageant cette aventure.
A ce moment de notre réflexion, nous étions motivés pour investir à Hong Kong.
guillaumek a écrit : ↑24 juillet 2021, 07:26
La Chine n'a pas change les regles comptables, ni demande de ne pas respecte les actionnaires (les entreprises listees de HK payent de plantureux dividendes qui sont cerise sur le gateau net d’impôt), les manipulations comptables existent mais ne sont ni plus ni moins fréquentes qu'en Europe ou aux Etats-Unis (Wirecard, Tesla...), les regles de marche sont transparentes et bien etablies.
Le problème c'est qu'on ne parle pas d'une fraude géante tous les 5 ans à la Enron ou Wirecard ici...
mais de centaines de fausses entreprises chinoises frauduleuses. Juste de notre expérience, ce sont déjà des dizaines d'entreprises !
Dans le seul
portefeuille daubasses 1 :
Qiao Xing Universal Resource : -100%, perte totale
China Crescent : -93%
T-Bay Holding : -88%
New Dragon Asia : -63%
Parmi les pertes les plus élevées de notre histoire et une surreprésentation d'entreprises chinoises avec pourtant un bilan en béton armé et de très beaux bénéfices !
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Votre retour terrain est intéressant. Que vous gériez avec brio une PME à Hong Kong c'est une chose. Nous vous en félicitons.
La réalité est que pour les entreprises cotées, c'est un univers à part où les chinois ont un malin plaisir à récupérer des capitaux occidentaux via des introductions foireuses ou des entreprises qui sont en réalité des coquilles vides.
Connaissez-vous le formidable travail de
Citron Research ? Nous suivons depuis maintenant près de 20 ans les travaux de Andrew Left. C'est un spécialiste du
short (vente à découvert). Il a eu un succès incroyable en shortant un nombre considérable d'entreprises chinoises cotées aux US. En fait, c'étaient des coquilles vides qui rachetaient des entreprises déjà cotées aux US (également des coquilles vides) pour ainsi avoir accès à la cotation US sans jamais avoir eu besoin de réaliser une introduction en bourse avec tout le formalisme réglementaire. C'est le principe de "reverse merge" (fusion inversée). Astucieux pour monter de très belles arnaques.
On ne trouve plus les archives sur le site de Citron Research , seulement
la liste des analyses qui ont débouclées sur une intervention des autorités compétentes, plus de 50.
[ajout : les archives sont bien disponibles sur le site : https://citronresearch.com/citron-report-archives/ ]
Heureusement, on avait travaillé sur ce phénomène et avons gardé une copie de toutes les opérations de l'époque !
155 analyses de 2001 à 2015. Un beau panel.
Le succès a été phénoménal avec quasiment un sans faute de 2001 à 2008 avec que des faillites ou des entreprises qui ont disparus.
Ensuite, Citron Research s'est orienté sur des entreprises américaines classiques (= non chinoises) et là le succès a été moins bon.
Sur toute la période étudiée par nos soins :
80% de pertes totales = gains de +100% pour un
shorteur !
124 faillites sur 155 entreprises analysées !!
12% de semi-réussites (gains mais pas encore de faillite)
8% de pertes (grosses hausses des actions)
Un jolie palmarès qu'on vous invite à découvrir ici :
Certains investisseurs faisaient même des enquêtes en Chine et se rendaient compte que la moitié des usines n'existaient pas et que lorsqu'elles existaient, elles étaient vides !
De mémoire, on peut vous citer quelques cas connus comme
Sino Forest, une entreprise qui était sensée détenir des forêts...
On vous renvoie vers l'article de La Tribune intitulé
L'étrange comptabilité des sociétés chinoises fait scandale à Wall Street.
Extraits :
Une vingtaine de sociétés retirées de la cote
Au cours des derniers mois, des dizaines de sociétés chinoises ont défrayé la chronique (China Electric, Duoyan...). D'après l'agence Reuters, trente ont vu leur cabinet d'audit démissionner et une vingtaine ont dû suspendre leur cotation sur des Bourses américaines. Dernier développement : lundi soir, l'éditeur de logiciels Longtop Financial Technologies a averti que le gendarme des marchés financiers américain (SEC) pourrait le poursuivre en justice, en raison de ses pratiques comptables.
Disciples chinois de Bernard Madoff
Mais c'est le cas de Sino-Forest qui fait le plus de bruit. Le 2 juin dernier, Muddy Waters publie un rapport révélant, documents à l'appui, que le groupe a exagéré la taille de ses revenus et de ses actifs forestiers. Le « short seller » Carson Block n'hésite alors pas à comparer les pratiques de la direction à celles de Bernard Madoff ! Celle-ci se défend, en vain...
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Quant à votre conclusion :
guillaumek a écrit : ↑24 juillet 2021, 07:26
Attention donc a s'extraire du bruit actuel des journaux au sujet de la grande mechante Chine qui a cree le virus et qui veut conquerir le monde.
La Chine n'a jusqu'ici donne aucun signe de vouloir spolie les actionnaires (contrairement aux etats Euopeens qui taxent les gains sur les actions et les dividendes)
Un peu de sérieux s'il-vous plait... Pas de complotisme ou amalgame ici. Rapportez des faits et des chiffres SVP pour soutenir vos propos.
La Chine a un track record incroyable de spoliation des actionnaires occidentaux. C'est le champion toute catégorie en la matière.
On le voit encore aujourd'hui avec de belles chinoiseries qui font (feraient plutôt...) du minage de bitcoin en Chine et cotées aux USA. Regardez
Future FinTech Group Inc (FTFT) ou
Bit Digital, Inc. (BTBT) par exemple.
De très très nombreuses entreprises chinoises cotées ont été créées par le passé dans le seul but de spolier les actionnaires occidentaux... et c'est encore le cas aujourd'hui !
Pour finir, notre objectif est de bien dormir avec les actifs que nous avons en portefeuille. Avec le bruit de bottes sur Hong Kong et le non respect des traités signés lors de la rétrocession de Hong Kong en 1997 du Royaume-Uni à la Chine avec un statut "Un pays deux systèmes" qui devait perdurer 50 ans, soit jusqu'en 2047... et donc déjà spolié (!), la coupe est pleine.
Sans doute qu'en tant que résident hongkongais vous avez une vision et un avantage particulier pour analyser et profiter de la situation actuelle. Tant mieux. Mais en tant qu'investisseur à distance, on voit tout cela d'un mauvais œil. Quelle sera la prochaine étape ? Comment les valorisations vont retrouver des couleurs dans ce contexte ? Quid de l'attractivité future de la place de Hong Kong et de l'arrivée des capitaux étrangers ?
Ce sera donc sans nous pour la Chine continentale communiste à laquelle nous intégrons aujourd'hui Hong Kong que nous considérons comme n'étant plus une zone autonome, démocratique et capitaliste.
Il y a tellement d'entreprises cotées à travers le monde, pourquoi s'embêter à prendre des risques démesurés ?